Résumé et Recommandations
Au cours des derniers mois, la République centrafricaine (RCA) a nommé un gouvernement transitionnel, démarré un processus de paix fragile, et a vu la signature d’un accord de cessation des hostilités. De plus, le 15 septembre, une opération de la mission de maintien de la Paix des Nations Unies sera officiellement déployée, et l’ambassade des États-Unis à Bangui reprendra ses opérations pour la première fois depuis presque deux ans. Malheureusement, les perspectives de paix en RCA sont amoindries sans un appui international soutenu et une intervention dans quatre domaines clés: la préparation aux élections prévues l’année prochaine ; la responsabilisation des auteurs d’atrocités ; le désarmement, la démobilisation, et la réintégration des combattants armés ; et les initiatives de réconciliation locale.
Au cours d’une visite en RCA en juillet, “The Enough Project“ a noté que la violence impitoyable d’une myriade de groupes armés dispersés, associée au manque d’attention et de moyens investis dans ces quatre domaines, a conduit à une dérive politique qui pourrait menacer les progrès récents et rendre la paix plus difficile à aboutir. Ces quatre domaines cibles ne couvrent pas la totalité des mesures urgentes nécessaires pour permettre aux Centrafricains de rentrer chez eux en sécurité. Ils se concentrent sur des secteurs d’activité qui pourraient faire dérailler le processus de paix faute d’une politique ciblée et d’un appui international approprié.
Les élections présidentielles et législatives, qui avaient été prévues pour février 2015, ont été récemment remises à plus tard dans l’année à cause de violences persistantes à travers le pays et du retard dans les préparatifs. Sécurité, protection, le soutien logistique pour l’organisation, et les stratégies de sensibilisation du publique manquent tous, bien qu’ils soient impérativement nécessaires afin d’établir les bases d’un processus d’élection que le peuple Centrafricain puisse considérer comme crédible. Des élections mal agencées basées sur un calendrier irréaliste pourraient exacerber les violences et conduire à un plus grand manque de confiance en les institutions gouvernementales. Les élections en RCA pourraient marquer un pas important vers une gouvernance efficace et crédible, si elles sont bien menées dans les conditions requises.
Au cours du conflit armé le plus récent, les acteurs armés issus de groupes variés ont communément commis des atrocités contre les civils. Les preuves montrent que beaucoup de ces atrocités peuvent être qualifiées de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, ou de génocide, et possiblement des trois. Les efforts pour mettre fin à l’impunité et pour que les auteurs de ces crimes soient menés devant la justice sont critiques pour le processus de paix en RCA afin d’établir l’archivage des faits, de restaurer dignité aux victimes, et de faire passer le message que les autorités nouvellement établies en RCA et la communauté internationale ne tolèreront pas les crimes graves dans la nouvelle phase de gouvernance de la RCA. Manquer d’adresser ces crimes pourrait concéder à des violences récidivées et agrandir davantage l‘écart de confiance déjà présent entre les citoyens de la RCA et leur gouvernement.
Le désarmement, la démobilisation, et la réintégration des combattants armés sont des étapes critiques au processus de paix en RCA. La plupart des efforts de DDR jusqu’à présent ont été ad-hoc et piètrement coordonnés et appuyés – avec des conséquences dangereuses. L’absence d’un programme de DDR efficace laissera des milliers de combattants en possession leurs armes comme uniques outils de subsistance. Cela laissera également intactes des groups armés tels que le Séléka et l’Anti-Balaka qui doivent être dissous pour qu’une paix durable prenne souche.
Le dialogue local et les efforts de réconciliation catapultés par la société civile commencent à prendre forme à Bangui et dans les villes avoisinantes. Ces initiatives ont successivement contribué à résoudre des disputes locales et à améliorer l’entendement de groupes antagonistes, mais elles font également face à des défis considérables et nécessitent un appui pour être déployées en dehors de la capitale. Les négociations locales sont facilement ballotées par les conditions de sécurité qui ne sont pas garantissables par les signataires de l’accord de paix fragile qui ne contrôlent pas la totalité des forces qui commettent des atrocités en RCA.
Le processus de paix ne peut pas aboutir si les groupes de combattants armés ne sont pas impliqués de manière constructive. Ces groupes ont des moyens considérables pour compromettre les avancées et pourraient être en mesure de faire tout capoter. “Enough“ a découvert au cours de son enquête en RCA que les clivages et les chaînes de commandement fragiles des groupes armés, en particulier au sein du Séléka et de l’Anti-Balaka, compliquent la transition politique et compromettent les efforts pour amener paix et sécurité au pays.
Une chose essentielle dans l’implication des groupes armés est de déterminer les motivations économiques du conflit et les sources de financement de leurs activités. “The Enough Project“ adressera ces problématiques dans des publications futures.
Recommandations
1. La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) doit prioriser la protection civile avec les ressources logistiques et techniques nécessaires à déployer rapidement en réponse aux incidents, en particuliers aux menaces aux déplacés internes et dans les enclaves où les civils ont un risque accru d’être attaqués.
2. Le gouvernement des États-Unis doit assurer que les autorités nationales électorales de la RCA aient la sécurité, le soutien institutionnel, et l’expertise nécessaires de la MINUSCA et du Groupe international de contact pour préparer les élections présidentielles et législatives. Le gouvernement des États-Unis doit mener la communauté internationale à appuyer les autorités électorales de la RCA à mettre en place indépendamment et à définir un calendrier adéquat qui ne résultera pas à des élections prématurées. Un tel calendrier devrait être basé sur des mesures de précautions et de sécurité appropriées pour les électeurs, les candidats, et les délégués officiels aux élections, et sur la réalisation des objectifs clés du calendrier électoral, tels que la mise en place d’une présence électorale dans chacune des 16 provinces, d’un bureau de vote, et d’un cadre légal pour les élections.
3. La MINUSCA doit appuyer le tribunal spécial de la RCA nouvellement en place en portant soutien substantiellement aux enquêtes, à la protection des témoins, et à l’expertise sur les stratégies de poursuite et les procédures réglementaires. Son appui doit être dans le prolongement des objectifs ultimes de poursuivre les pires crimes de barbarie, en transférant les preuves et renseignements à la Cour Pénal Internationale dans les cas appropriés, et en contribuant à créer une expertise au sein du système judiciaire intérieur de la RCA.
4. Les États-Unis doivent prendre un rôle de leadeur dans la constitution et le fonctionnement du tribunal, comme ils l’ont fait dans des tribunaux ad-hoc précédents, en fournissant moyens et experts judiciaires pour assurer que les dossiers restent libres et que les juristes nationaux soient efficaces dans leurs efforts pour enquêter sur les crimes, arrêter les auteurs, et procéder à des procès justes.
5. Le gouvernement des États-Unis doit mener le Groupe international de contact pour assurer que les dirigeants Centrafricains et la MINUSCA aient les moyens nécessaires pour développer un plan de DDR efficace aussi rapidement que possible. Le plan de DDR doit prendre en compte la diversité des besoins des différentes communautés de la RCA, exclure l’amnistie pour les auteurs de crimes graves, et proposer des projets de réintégration visant particulièrement la jeunesse marginalisée et intégrer les ex-combattants hommes et femmes dans leurs communautés locales.
6. La MINUSCA doit contribuer à sécuriser, coordonner, et soutenir les efforts locaux de réconciliation déjà en cours, et mesurer les efforts pour atteindre les territoires isolés en dehors de Bangui dans l’objectif de faire la transition vers un processus de réconciliation plus formel à l’échelle nationale quand que le niveau de sécurité et les accords politiques le permettront. L’Agence des Etats-Unis pour le Développement International (USAID) doit fournir des moyens et des équipes de médiation pour appuyer les procès conduits localement traitant de désaccords à petite échelle liés à l’appartenance religieuse mais aussi aux associations politiques, au genre, à l’âge, aux moyens de subsistance et aux ressources naturelles.
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Executive Summary
In recent months, the Central African Republic (CAR) has appointed a new transitional government, started a fragile peace process, and seen the signing of a cessation of hostilities agreement. In addition, on September 15, a U.N. peacekeeping operation will officially deploy, and the U.S. embassy in Bangui will resume operations for the first time in almost two years. Unfortunately, the prospects for peace in CAR are diminished without sustained international support and action in four key areas: planning for elections scheduled for next year; accountability for the perpetrators of atrocities; the disarmament, demobilization, and reintegration of armed combatants; and local reconciliation initiatives.
During a visit to CAR in July, the Enough Project found that relentless violence from a myriad of dispersed armed groups, combined with a lack of focus on and resources for each of these four areas, has led to a policy drift that could threaten recent achievements and make peace harder to attain. These four areas of focus do not cover all urgent tasks necessary to allow Central Africans to return to their homes in safety. They are focused on areas of activity that could derail the peace process without policy focus and sufficient international support.
CAR’s presidential and legislative elections, which had been scheduled for February 2015, were recently pushed back to later in the year because of persistent violence across the country and a delay in preparations. Security, protection, logistical support for planning, and public outreach strategies are all lacking, yet urgently needed in order to lay the groundwork for an electoral process that the Central African people can consider credible. A poorly run election held on an unrealistic timeline could exacerbate violence and lead to greater mistrust in government institutions. CAR’s election could be an important step to effective and credible governance, if it is run well under the right conditions.
Over the course of the most recent armed conflict, armed actors from diverse groups have committed widespread atrocities against civilians. Evidence shows that many of these atrocities may amount to grave war crimes, crimes against humanity, or genocide, and possibly all three. Efforts to end impunity and bring perpetrators of these crimes to justice are critical to CAR’s peace process in order to establish a record of what happened, restore dignity to victims, and send a message that CAR’s new authorities and the international community will not tolerate grave crimes in CAR’s new phase of governance. Failing to address these crimes could allow for repeated violence and entrench existing gaps in trust between CAR’s citizens and its government.
Disarming, demobilizing, and reintegrating armed combatants is a critical cornerstone of CAR’s peace process. Most of the DDR efforts to this point have been ad hoc and poorly coordinated and supported—with dangerous effects. The absence of an effective DDR program will leave thousands of fighters with their weapons as their only livelihood tool. It will also leave intact armed groups such as Séléka and Anti-Balaka that must be disbanded for sustainable peace to take hold.
Local dialogue and reconciliation efforts spearheaded by civil society are starting to take shape in Bangui and nearby towns. These initiatives have successfully helped resolve local disputes and improve understanding between conflicting groups, but they also face considerable challenges and need support to extend outside the capital. Local talks are easily buffeted by security conditions that cannot be guaranteed by signatories of a fragile peace agreement who do not control all of the forces that commit atrocities in CAR.
The peace process cannot succeed if the armed combatant groups are not constructively engaged. These groups have a significant capacity to undermine progress and could be significant spoilers. Enough found during its research in CAR that schisms and weak chains of command in the armed groups, particularly Séléka and Anti-Balaka, complicate political transition and threaten efforts to bring peace and security to the country.
A key aspect of engaging the armed groups is determining the economic drivers of the conflict and sources they use to fund their activities. The Enough Project will address these issues in future publications.
Recommendations
1. The U.N. Multidimensional Integrated Stabilization Mission in the Central African Republic (MINUSCA) should prioritize civilian protection with logistical and technical resources necessary to deploy rapidly in response to incidents, particularly threats against internally displaced people and in enclaves where civilians are at a heightened risk of attack.
2. The U.S. government should ensure CAR’s national electoral authority has the security, institutional support, and expertise it needs from MINUSCA and the International Contact Group to plan for presidential and legislative elections. The U.S. government should lead the international community in supporting CAR’s national electoral authority in its independence and its determination of an appropriate timeline that does not result in premature elections. Such a timeline should be based on adequate safety and security for voters, candidates, and electoral officials and the achievement of key electoral planning benchmarks, such as the establishment of an electoral presence in all 16 provinces, a voter registry, and a legal framework for elections.
3. MINUSCA should support CAR's new special tribunal by assisting substantially with investigations, witness protection, and expertise on prosecutorial strategies and due process. Its support should be in furtherance of the ultimate goals of prosecuting the worst atrocity crimes, transferring evidence and information to the International Criminal Court where appropriate, and helping build lasting expertise within CAR's domestic justice system.
4. The U.S. should take a leadership role in the establishment and operations of the tribunal, as it has in previous ad-hoc tribunals, by contributing resources and legal experts to ensure cases remain independent and national jurists are effective in their efforts to investigate crimes, apprehend perpetrators, and carry out fair trials.
5. The U.S. government should lead the International Contact Group in ensuring Central African leaders and MINUSCA have the resources they need to develop an effective DDR plan as quickly as possible. The DDR plan should account for CAR’s diverse community needs, exclude amnesty for perpetrators of grave crimes, and offer reintegration projects that target marginalized youth in particular and integrate male and female ex-combatants with their local communities.
6. MINUSCA should help secure, coordinate, and support local reconciliation efforts already underway and scale efforts to reach remote areas outside of Bangui with the aim of transitioning to a more formal, nationwide reconciliation process when security and political agreements allow. The U.S. Agency for International Development (USAID) should contribute resources and mediation teams to support locally-led processes that address small-scale divisions related to religion but also political association, gender, age, livelihoods, and natural resources.
Photo: Several hundred protesting merchants, one holding a placard using the french acronym of the country's name, hold a demonstration calling for peace as negotiators prepare for talks with rebels from the north, in downtown Bangui, Central African Republic Saturday, Jan. 5, 2013. (AP Photo/Ben Curtis)